Novembre 2020 (écrite avant les élections américaines)
Alors que la pandémie du Covid confine les populations et plonge les économies occidentales dans le chaos économique, l’actualité climatique, indifférente, continue d’imprimer sa marque dans nos esprits avec de nouveaux records (température mondiale en septembre, surfaces brulées en Californie, rétrécissement de la banquise Arctique, puissance de la tempête Alex en France, etc.)
Dans le brouhaha caractéristique du 21ième siècle, augmenté par la pandémie, il n’est donc pas inutile, de souligner l’alignement géopolitique international qui s’est produit ces dernières semaines avec :
1/ l’annonce par les 3 géants économiques asiatiques (Chine, Japon et Corée du Sud) de leur engagement à atteindre la neutralité carbone, rejoignant ainsi la dynamique lancée par l’UE,
2/ la volonté exprimée par la Commission et le Parlement européens, d’accroître l’ambition de réduction d’émissions de CO2 pour 2030, fixée initialement à -40%, à respectivement -55% et -60%.
C’est un peu comme si l’enjeu climatique devenait une nouvelle boussole pour le monde.
Une situation bien différente de la décennie précédente où la crise des subprimes de 2008 avait stoppé net l’élan donné par le rapport du GIEC 2007, avec notamment le succès mondial du film d’Al Gore, et en France, le lancement du Grenelle de l’Environnement.
Il est vrai que les évènements atypiques se multiplient, événements dont le réchauffement climatique est quasi-toujours considéré comme un facteur contributif important sinon majeur.
C’est donc un bon moment pour revenir sur le sens des accords de Paris de 2015, étape stupéfiante où tous les dirigeants du monde (195 pays), acceptant le consensus scientifique porté par le GIEC, se sont fixés pour objectif de limiter le réchauffement à 2°, avec une cible plus ambitieuse de 1,5°.
Il faut comprendre que pour réaliser cet objectif il n’y a pas d’autres solutions que de viser la « neutralité carbone » c’est-à-dire un niveau d’émissions mondiales inférieur à ce que les puits de carbone naturels[i] peuvent absorber annuellement.
Et ceci au plus vite pour stopper l’accumulation du CO2[ii], principale cause du réchauffement.
Et il existe aussi un consensus scientifique sur une fourchette de maximum de carbone restant à émettre pour éviter de franchir les 2° (avec une probabilité supérieure à 2/3). C’est ce qu’on appelle communément le budget carbone.
Ce modèle simplifié a l’énorme avantage de permettre aux dirigeants nationaux de se fixer un budget carbone national[iii], et donc une feuille de route pour ne pas le dépasser.
Il reste qu’à mon avis, trop peu de gens ont à l’esprit l’extraordinaire consommation d’énergie (fossile à plus de 80%) nécessaire à la prospérité des économies développées et ses modes de vie associés. A titre d’exemple, l’empreinte carbone annuelle d’un français (11,2 tonnes de CO2eq), équivaut à la combustion d’essence nécessaire pour faire 1,5 tour de la terre[iv].
Il est donc légitime de se poser la question de savoir s’il est vraiment possible de tenir l’objectif de réduction d’énergies fossiles et, en même temps, de jouir du même mode de vie avec des sources d’énergie alternatives et/ou surtout moins d’énergie ?
D’où les débats particulièrement houleux en France sur la remise en cause de la croissance, de la notion de PIB, du capitalisme, du commerce international, de l’innovation technologique ?
Heureusement que les réponses ne sont pas un prérequis pour agir dès maintenant.
[i] Auxquels il faut rajouter les technologies potentielles de captation et de stockage du carbone, actuellement balbutiantes
[ii] Le CO2 reste dans l’atmosphère une centaine d’années et sa concentration actuelle dans l’atmosphère provient donc des émissions cumulées depuis 1920
[iii] C’est ce qu’a fait l’Union Européenne, décliné par pays. Pour la France ça donne ça :
[iv] détail du calcul